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05/11/2011

177. Le meuble et la conscience


Texte lu


Voici une petite scène entre trois interlocuteurs.

« Tu vas déménager... Quand tu vendras ton appartement, comme tu en as beaucoup, tu laisseras les meubles ? »

« Je ne sais pas. En tout cas, je garderais et j’emporterais le meuble qui me vient de ma grand-mère. »

« La troisième personne ne disait rien. Un silence qui ne passa pas inaperçu. L’un d’eux lui lança : « Oui, je sais ce que tu vas dire ! » »

« Je n’ai rien dit. »

« Mais tu l’as pensé si fort ! »

« Ah bon. Et de quoi s’agit-il ? »

« Qu’il ne faut pas s’attacher aux objets. »

« C’est une possibilité. »

« Ah, tu vois ! Mais toi, je suppose que tu n’as pas de meubles ou d’objets qui appartenaient à tes parents ? »

« Si. »

« Ah, quand même ! Et alors ? »

« J’ai notamment deux meubles de mon grand-père : l’un faisait partie de la chambre qu’il acheta lorsqu’il s’installa après son mariage, l’autre qu’il confectionna lui-même (il était ébéniste) : une commode. »

« Parlons donc de cette commode. C’est un souvenir particulier, une création de ton grand-père. »
« C’est effectivement le cas pour la création. »

« Et cela n’évoque pas des souvenirs, un attachement spécial à cet objet ? Et d’abord, t’en séparerais-tu ? »

« Beaucoup de questions, aussi, dans l’ordre : des souvenirs : oui ; un attachement spécial : non ; pourrais-je m’en séparer ? Oui. »

« Incroyable. Et pourquoi gardes-tu ces meubles ? »

« Pour leur utilité. »

« Et le fait que cela soit ton grand-père, que tu aimais bien, qui l’a conçu, t’en séparer ne te ferais vraiment rien ? »

« La conception de ce meuble procédait d’une expérience de conscience parmi d’autres, vécue par mon grand-père. Ce qui importe, c’est lui en tant que conscience, une conscience fondamentalement identique à toutes les autres, notamment lorsqu’elle n’est pas accaparée par des expériences, quelles qu’elles soient : cela se produit lorsque l’attention emplit le champ de la conscience. Donc, par l’attention, je suis mon grand-père comme élément d’une conscience universelle, non pas au niveau de la personnalité ou de l’ego. »

« Je ne sais pas si je te comprendrais un jour ! »

« Qui sait... »


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