Texte lu
Dans le texte précédent (§ 80. Le paradoxe de la croyance), il fut mentionné que l’une des ambitions de la croyance consistait à « métamorphoser un château de cartes en forteresse imprenable ». Si une pensée unique peut réaliser ce tour de force, elle n’y parviendra que mieux en s’associant : la croyance se partage, et c’est ainsi que naissent les religions et les spiritualités, qu’elles trouvent une assise et gagnent en expansion.
Il semble donc intéressant d’étudier ce
socle sur lequel tout semble reposer.
La croyance rassemble (l’être humain est
un « animal grégaire »), elle constitue le ciment qui donne la
cohésion au groupe, lui permet de se réunir autour d’une doctrine, qu’elle soit
d’inspiration religieuse ou de nature laïque. Chaque personne impliquée dans
cette perspective y puise de l’énergie (effet de groupe) et trouve la sécurité
(identification et partage).
Cela est perçu dès le début de la
fréquentation, permettant au groupe initial de durer et de prospérer, du moins,
tant qu’il réussit à capter les consciences.
Cependant, le réconfort procuré par
l’adhésion à une « église » contient des limites, impose des
contraintes.
La frontière apparaît lorsque des
interrogations légitimes reçoivent des réponses insatisfaisantes, un mutisme,
ou le déni ; alors les fondations tanguent, éprouvant la cohésion, et les
liens se distendent.
L’asservissement exige de ne pas franchir les lignes de démarcation.
Adhérer, c’est accepter de porter une « laisse » psychique, qui peut
offrir du champ, de la latitude, mais transmet une vive tension au disciple
soudain épris d’un désir de connaître au-delà de ce qui lui est proposé.
Initialement, la soif de savoir est souvent bien accueillie, même
encouragée : « tu as des questions, c’est tout à fait normal, et
nous sommes là pour t’apporter des réponses. ». Mais ceux qui demeurent
insatisfaits, continuent d’interpeller, évoquent d’autres explications doivent
s’éloigner d’eux-mêmes s’ils veulent éviter l’exclusion. C’est le prix à payer
pour la mutualisation.
En a-t-on fini avec la croyance ?
Est-elle limitée à l’effet du groupe ? Non, et l’on peut accentuer son
paradoxe.
La croyance n’a nul besoin d’autres
personnes pour être partagée , cela peut se produire « en interne »,
avec soi-même !
Les informations acquises sur une croyance
par divers medias (livres, vidéos, Internet), dès lors qu’elles suscitent une
étude régulière, un engouement et une ferveur, deviennent substantielles. Elles
créent un point de référence, un refuge où l’on aime à « se
trouver », comme la fréquentation d’un groupe partageant nos idéaux !
Si la croyance se partage, la connaissance
de soi se vit seule. Elle débute d’ailleurs par une solitude complète dans le
milieu utérin, lorsque le foetus perçoit ses premières sensations, interagit
avec son environnement. Se poursuivant avec le libre arbitre, elle est susceptible
d’accéder à l’expression de la pleine conscience.
Alors, souhaitant s’engager sur le chemin
de la connaissance de soi, doit-on appréhender cette solitude ? Non, car
outre les trésors qu’elle permet de découvrir en soi, cette connaissance, par
la conscience qu’elle développe naturellement, dissipe les attentes, substitue
à l’espérance la beauté de l’instant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire