Texte lu
Après « Ne pas juger » (§ n° 99), une autre recommandation qui va dans le même sens, mais plus difficile à tenir. Tentons l’expérience : qui peut le moins, peut s’aventurer vers le plus !
On ne peut véritablement accepter un
concept qu’à partir du moment où celui-ci intègre notre champ de compréhension.
Une évidence semble-t-il, mais qui demeure la bienvenue pour aborder le chemin
escarpé du pardon.
Les futures actions germent tout d’abord
sous la forme de pensées. Au premier stade de leur développement, celles-ci
sont amorales, elles acquièrent une éthique dans la conscience selon
l’éducation reçue et les valeurs personnelles développées.
Considérons un acte susceptible d’affecter
l’intégrité psychique ou physique d’autrui. Le libre arbitre, lié à la moralité
et aux sentiments éprouvés, commandera ou non la décision d’agir.
Si l’on décortiquait l’ensemble des
éléments concourant à la décision ultime, on pourrait y trouver
pêle-mêle : pulsions, tendances, sensations, peur, excitation,
spéculation. Un ensemble de composants qui s’opposent, s’annulent ou se
renforcent, mais d’où proviendra au final la résultante : le passage à
l’acte, ou non.
Si l’on disposait de toutes les
informations qui interfèrent au moment de l’accomplissement, il serait possible
de déceler celles qui emportent la décision. On comprendrait alors parfaitement
les rouages de la conscience impliquée.
Dès lors, une hypothèse se fait jour. Une
personne avertie, saine d’esprit et respectueuse se défendra de nuire. Cette
démarche suppose un certain nombre d’acquis.
On peut en déduire que les conduites
préjudiciables procèdent de tendances incontrôlables ou d’un manque de
connaissances. Ce dernier terme étant compris comme l’intégralité des
informations et des perceptions nécessaires à la réalisation d’actions
naturelles, en accord avec la notion de conscience universelle présente en
chaque être.
Ceci étant posé, revenons au concept du
pardon.
L’acte de pardonner suppose un référentiel
préalable, qu’il soit moral, spirituel ou religieux, l’aspirant à la
miséricorde y puisera l’énergie indispensable.
En effet, tenant le rôle de
victime il convient, pour adopter cette posture, d’être capable de transformer
une charge émotionnelle puissante, faite de ressentiments et de souffrances, en
abnégation compassionnelle. Une lutte s’engage entre les meurtrissures subies
et la volonté de pardonner pour satisfaire une conviction.
Maintenant l’idée d’une absence de
connaissances à l’origine des actes néfastes, on peut s’affranchir du pardon,
lui substituant une compréhension totale avec un degré d’attention suffisant.
Ce maintien empêche également de sombrer dans l’excès émotionnel, ajoutant de
la souffrance à la souffrance sur une période indéfinie.
Cela ne contrarie nullement le maintien
d’un système préventif et répressif organisé dans un cadre sociétal approprié.
Il est cependant permis de s’interroger
sur les conditions qui prévalent à cette organisation, de leur capacité réelle
à transformer les personnes y séjournant : deviennent-elles meilleures et
adaptées socialement ? Ne conviendrait-il pas d’oeuvrer davantage en amont
en rappelant l’interpellation de Victor Hugo : « Ouvrez des
écoles, vous fermerez des prisons. » Mais des établissements intégrant la
dimension émotionnelle, le respect d’autrui, la considération de la nature.
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