Texte lu
C’est un repas festif entre amis, semblable à toutes ces réunions enjouées où l’on est certain de passer d’agréables moments. D’ailleurs, l’ambiance est à la rigolade, et chaque participant y va de sa prestation personnelle, apportant le « carburant » nécessaire pour alimenter le moteur de la bonne humeur !
Enfin chacun, c’est à voir...Justement, une apostrophe est adressée à
l’un des convives qui, bien qu’intégré au groupe et contribuant aux
réjouissances, se fait rare dans ces soirées et adopte davantage une posture
d’écoute.
« Eh bien, tu vois, c’est agréable et
sympa de passer du bon temps entre amis ! »
« Je n’ai jamais dit le
contraire. »
« Non, mais tu es rarement là ! »
« Il préfère être seul, tranquille,
et consacrer du temps à faire ce qui l’intéresse. »
« Qu’est-ce qui t’intéresse ? »
« Des choses diverses et variées,
mais il est vrai que j’apprécie le calme et le silence. »
« Pour faire quoi ? »
« Je crois bien que c’est parti pour
un interrogatoire impitoyable ! »
« Tu répons si tu veux. »
« Oui, bien sûr, mais il n’y a aucune
raison de ne pas le faire. »
« Donc, être tranquille et calme pour
faire quoi au juste ? »
« Rien ; »
« ???... »
« Et tu t’ennuies pas ? »
« Non. »
« Comment c’est possible ? »
« En restant simplement attentif à ce
qui se passe autour de soi, ou bien en respirant consciemment. »
« Tiens, j’ai envie d’essayer pour
voir... »
« Arrête ! Tu vas plomber
l’ambiance ! »
« Il a raison. Mais une autre fois,
lorsque tu le souhaiteras, je reste à ta disposition pour t’aider dans cette
expérience. »
« Entendu. »
« Moi j’ai une question... »
« Oui... »
« Qu’est-ce que ça t’apporte ces
moments de solitude à être attentif ou respirer consciemment ? »
« Un bien-être, une paix intérieure,
de la facilité pour réfléchir aux problèmes et aborder les questions
essentielles de l’existence. »
« Un exemple de question
essentielle... »
« Là, c’est toi qui vas plomber
l’ambiance ! »
« C’est pas grave, on se rattrapera
après ! »
« Le sens de l’existence, par
exemple, ou découvrir sa propre nature. »
Depuis l’apparition de ce dialogue
impromptu, on pouvait percevoir avec netteté la progression du silence qui
gagnait l’ensemble des autres convives, jusqu’à devenir intolérable ! Un
bon mot fuse, n’ayant aucune difficulté à se faire entendre et comprendre dans
ce calme quasi religieux ! Ouf ! Il était temps !...
C’est ce qu’attendaient la plupart des
hôtes de cette soirée festive, et un « lâcher » de rires bruyants et
salvateurs témoigne de la gratitude de l’assemblée envers l’auteur de cette
saillie drolatique !
Cette anecdote va permettre de dégager
deux réflexions sur ce sujet.
Si l’attention et la respiration
consciente peuvent être pratiquées à tout moment, les aborder et en expliciter
la pratique et les bienfaits ne semblent pas s’accorder avec les thématiques
engagées dans ce type de soirée ! En tout cas, il faut savoir discerner le
moment opportun pour le faire, au risque d’en dégoûter l’auditoire pour le
restant de ses jours !
Le propos ne consiste pas à suspecter ou
discréditer ce type de réunion entre amis. C’est une pratique sociale courante
et appréciée à juste titre.
En observant cette tradition sous l’aspect
pédagogique, il est possible d’en dégager un certain enseignement se rapportant
à la connaissance de soi, et notamment aux pensées intrusives ou parasites. Une
mise au point rapide : il ne faudrait pas rechercher ou trouver ici une
quelconque analogie, un rapprochement souhaité entre les habitués de ce type de
réunion et les « parasites » !
Non. Il s’agit d’émettre une hypothèse :
ce type de manifestation, lorsqu’il est fréquent et s’intègre dans un emploi du
temps chargé en événements ludiques, révélant une boulimie d’activités de
groupe, peut être la concrétisation de pensées intrusives et parasites. Il faut
multiplier les rencontres, fréquenter les lieux actifs et sonores pour ne pas
se retrouver seul face au « bruit intérieur » assourdissant de ses
propres pensées.
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